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Circuit Bikepacking de la Réserve Faunique des Laurentides - Rivières aux Écorces

Explorer le secteur du lac aux Écorces


Photos et Texte de Romain Rosant et François Carier Deziel

Rien de très compliqué. Rendez-vous à Stoneham un vendredi matin autour de 6 heures. Départ pour la Rivières aux Écorces. Juste prévoir être autonome pour la fin de semaine.

De la bouffe déshydratée (2 soupers, 2 déjeuners) et de quoi s’alimenter en continu pendant la journée (noix, barres tendres, jerky, jujubes et toutes les petites cochonneries qu’on culpabilise à manger au quotidien : en bike tout est permis). Cinq fatbikes dont 4 “pimpés” en 27.5 + (pneus de 3 pouces) incluant leurs kits complets de sacs de cadre. Cinq complices, deux chars et nous voilà en route.

Au menu, une boucle en 2 étapes sur le territoire de la réserve faunique des Laurentides ben au nord du parc de la Jacques Cartier.
Jour 1 : départ sur le chemin 36, un peu au Nord de la Rivières aux Écorces que nous longerons jusqu’au refuge du secteur 77 pour camper près du lac Saint Henri;

Jour 2 : Départ du refuge sur le chemin 364 pour remonter vers le lac aux Écorces et rejoindre le refuge du secteur 71 sur le chemin 36 à une dizaine de kilomètres des chars;

Jour 3 : Une dizaine de kilomètres pour rejoindre les chars et retour à la maison en fin de matinée.

Bon, ça ce sont les plans initiaux. Maintenant, comme dans tout bon trip de bikepacking, il y a des imprévus. C’est la première chose que nous rappellent les employés de la SEPAQ lors de notre enregistrement au Gite du Berger. La neige abondante de l’hiver passé et les pluies soutenues qui sévissent sur le Québec depuis le printemps ont partiellement rendu les trails impraticables à certains endroits. Et devinez quoi, ça se peut que les trails de notre itinéraire soient concernées.

Bon, on est en bike. Un char, c’est sûr c’est pas mal limité. Mais un bike, ça va passer non? Le « hike a bike » version « walk of shame » c’est monnaie courante en bikepacking alors au diable les avertissements! Et puis rien n’est plus flexible qu’un voyage en bike alors on peut toujours se permettre d’improviser en temps et lieux (la vrai liberté le bike).

On tente le coup.

Plutôt qu’un départ sur le chemin 36 (impraticable) que nous avions choisi pour sa vue scénique, nous devons partir par la 382 et rejoindre la 36 est, plus au sud et au nord du lac aux Écorces, le tout pour rejoindre comme prévu le lac Saint Henri pour la soirée. Tiens donc ! La première journée se déroule comme un charme. Chemin forestier sinueux, paysage satisfaisant, température fraiche et pluvieuse, notre besoin de grands espaces est comblé. Sans être trop technique, le dénivelé très vallonné offre quand même quelques défis et impose des changements de rythme constant. Un bel exercice quoi.

Il y a aussi les mouches. Normal, me direz-vous. Franchement on en a vu d’autres à ce niveau-là, mais c’est pas mal intense cette année. Merci à cet été particulièrement pluvieux. Elles sont toutes là, toutes les sortes comme dans un party de famille. Elles sont une sorte de motivation à l’effort relativement efficace. Bref on ne s’arrête pas trop longtemps pendant le trajet, sauf pour accepter la bière que nous offre généreusement un groupe de pêcheurs croisé en fin de journée, priorité oblige.


La journée passe, et nous sommes tous très heureux d’avoir décidé de camper près d’un refuge très rustique le soir venu afin d’avoir un espace de vie dénué d’insectes et passer une agréable soirée. Le minimalisme imposé par le bikepacking nous aurait rendus très vulnérables à ces dernières et aurait probablement écourté cette belle soirée.

Notre deuxième journée est un peu plus folklorique. Comme anticipé, l’itinéraire du jour devient vite impraticable à la mi-chemin. Nous empruntons la 364 par le lac Mescouac pour rejoindre la 36 au nord du lac aux Écorces. Nous décidons alors de tenter d’emprunter la 36 vers le Nord, la même section non recommandée par le personnel de la réserve faunique. Jusque-là les chemins empruntés restaient praticables, et les sections encombrées d’accumulation d’arbres tombés et de branchages morts dus à l’hiver exceptionnellement enneigé pouvaient être surmontées. Descendre du bike, se faire un chemin dans les branches, pousser le bike. Un bel exercice. À mesure que nous avançons, les sections sont de plus en plus longues, l’exercice de plus en plus intense. Ça prendrait une machette, voir bientôt une chainsaw. Franchement le Québec n’a parfois rien à envier à la jungle amazonienne niveau densité, encore moins au niveau des moustiques.

Ça avance de moins en moins bien. Même le merveilleux Chic-Chocs en carbone est de plus en plus difficile à pousser. Les mouches elles, sont aux anges devant notre statique vulnérabilité. On marche désormais plus que l’on pédale. Elles nous bouffent littéralement même avec un filet sur la tête. Vers 13h on frappe un mur. C’est trop dense devant nous.


On part sans les bikes en reconnaissance, afin de savoir ce qui nous attend et si l’effort en vaut la peine. Moins de 500 m plus loin, en plus d’une jungle boréale digne de ce nom, c’est désormais le chemin qui a foutu le camp. Les crues l’on emporté, laissant place à une section trop dangereuse à passer. Aucune alternative autre que de revenir sur nos pas. Le reste du trip est désormais compromis. Il n’y avait pas d’autre chemin pour espérer retourner à notre point de départ dans les temps.

Plus de boucle possible donc. Quitte à se retaper le même trajet que la veille, nous décidons (tout en consultant nos amies les mouches de plus en plus agressive) de rouler plus et de rejoindre les chars dès ce soir. Pas de camping. Une bière et un resto à la place. Un défi intéressant à relever (pas la bière!) pour faire passer la frustration de ne pouvoir continuer. On ne s’avoue pas vaincus. L’appel de la bière lutte avec l’appel de la nature. On ride donc en sens inverse, le chemin de la journée et celui d’hier. Un bon 75.5 kilos journalier bien tapé. On finira tard. On soupera tard. Mais c’était quand même ben le fun malgré les difficultés. Même en étant aguerris, même au Québec, même en full carbone, le bikepacking reste à l’écoute et à la merci de la nature. Il force l’humilité et encourage l’imprévisible.

La morale de l’histoire : l’important en bike ce n’est pas l’arrivée à destination, mais bien tout ce qui ce passe après le départ. L’important c’est de pédaler. L’aventure c’est l’aventure.

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